La déclaration Schuman, fondatrice de l’Union européenne, a soixante cinq ans.
Le 9 mai 1950, cinq ans après la fin d’un conflit meurtrier, Robert Schuman, alors ministre des Affaires étrangères français, prononçait une « déclaration » appelant à la mise en commun du charbon et de l’acier par la France et l’Allemagne. Cette « déclaration Schuman » (ICI) est, depuis cette date, considérée comme l’acte de naissance de l’Union européenne : nous « fêtons » donc l’Europe le 9 mai et tout au long du mois.
Même si c’est Robert Schuman qui prononce cette déclaration, c’est surtout à Jean Monnet que l’on doit sa conception. Tout au long de la guerre, il a pensé cette construction européenne, en particulier les relations entre la France et l’Allemagne concrétisées par la mise en commun des productions d’acier et de charbon qui permettront la reconstruction et la paix.
Il n’est pas sûr que les deux cents journalistes présents dans le salon de l’Horloge, ( voir photo) au Ministère des Affaires étrangères, le 9 mai 1950, aient compris toute l’importance, à long terme, de cette déclaration, qui reste une référence pour tous les démocrates, en Europe, et hors d’Europe. Pourtant, un nouvel horizon s’ouvrait, certes pour la paix, mais aussi pour l’amitié entre les peuples -l’Allemagne et la France prioritairement- et la solidarité entre les pays d’Europe.
Ainsi commence la construction de l’Union européenne, il y a soixante cinq ans, une histoire faite de hauts et de bas, d’avancées-à « petits pas »- et de crises.
« Fêter « l’Europe aujourd’hui ? Le terme convient il ? Oui, il n’est pas question de renier un mot de ce qui fait l’Europe. Nous avons besoin d’elle, elle a besoin de nous, nous sommes profondément européens, par raison, comme beaucoup, par choix comme certains, mais aussi par conviction, comme de moins en moins d’Européens et singulièrement de Français.
« Fêter » l’Europe est aujourd’hui, en mai 2015 terriblement difficile, mais cela ne veut pas dire que nous abandonnions une once de nos convictions. Nous sommes profondément convaincus que sans l’Europe, la France ne pourra plus prétendre tenir son rôle dans le concert mondial, et que personne ne vienne nous dire que nous ne sommes pas « patriotes » car nous le sommes autant que nous sommes européens.
Aimer, ne veut pas dire se voiler la face, et nous sommes lucides. L’Europe va mal ! Les exemples de cette crise sont nombreux. Parmi les derniers, les drames vécus en méditerranée sont présents dans toutes les mémoires.
Que fait l’Europe face à cette situation ? Rien ou si peu ! Elle ne veut pas ? En réalité, elle n’en a pas les moyens, non pas financiers, mais politiques. Les propositions du Président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, au dernier somment européen annoncé comme « urgent » pour trouver des solutions au drame des migrants ont été rejetées par les dirigeants européens, toutes sauf des mesures qui ne règlent rien. Nos dirigeants veulent garder la main sur leur politique d’immigration, alors que chacun sait qu’un pays seul est incapable de répondre à ce défi. Cette Europe des dirigeants, non, ne voulons pas la fêter ! A partir de combien de drames de cette ampleur nos hommes politiques vont-ils comprendre que l’Europe de Jean Monnet, celle dont nous fêtons les soixante cinq ans, a été créée pour la solidarité des peuples ? Ce n’est pas moins d’Europe qu’il faut, mais plus d’Europe !
Les élections britanniques ont vu la réélection de David Cameron : un référendum est promis aux électeurs sur la sortie ou non de l’UE. Comme le « twitte » Robert Rochefort, une seule question accaparera toute l’actualité à Bruxelles pendant deux ans : le laisser partir [le Royaune Uni] ou lui accorder de nouvelles concessions ?
La grande question pour les Anglais est justement le droit de séjour des personnes sans emploi, et derrière cette problématique, celle de l’entrée des migrants et de la libre circulation dans l’espace Schengen. Même si Jean-Claude Juncker rappelle que les quatre libertés restent non négociables, chacun sait que les applications ne sont pas toujours fidèles à la lettre et que les Anglais sont champions des « opting out »(droit de retrait). Les Anglais ne veulent ni de l’euro, ni de Schengen, ni de la Charte des droits fondamentaux; ils demandent des rabais de cotisation : le « I want my money back » de Margaret Thatcher a dix ans mais est toujours d’actualité. En termes clairs, on prend dans l’UE ce qui arrange, les avantages, le libre marché, sans les inconvénients. Il y a fort à parier que les Anglais négocieront toujours plus … jusqu’où ? Et pendant ce temps, l’Europe sera-t-elle toujours en panne ?
Les événements passés ont montré que les décisions importantes sont prises en temps de crise « au bord du gouffre ». Faut-il souhaiter que les crises soient telles que l’Europe se décide à agir ? Faudra-t-il en « passer par là » pour qu’enfin les chefs d’état ne disent plus « blanc » à Bruxelles et « noir » dans leur pays, qu’ils prennent des décisions responsables pour que cesse enfin ce slogan trop souvent entendu: » c’est la faute à l’Europe » !
Pour ce 9 Mai 2015, Paris a fêté l’Europe en musique … Oui, l’Europe a droit à cela, mais fêtons une Europe solidaire et responsable, celle qui a été voulue il y a soixante cinq ans, « l’Europe que nous voulons« .
Le premier projet de la déclaration Schuman
Viviane Boussier, au nom du Groupe MoDem Europe 78